// Aux alentours de Polis

Sortir en douce de Polis c'était une chose. Y rentrer sans se faire prendre en était une autre, mais Roan n'avait pas peur de ça. S'il se faisait prendre, il affronterait Heda sans crainte des conséquences. Il était déjà destitué de son titre, interdit de retourner sur ses terres, qu'est ce qui pouvait être pire ? Perdre sa tête comme l'ambassadeur ? À faire cela, la Coalition se mettait en position délicate. Car si un ambassadeur était remplaçable, un prince était une tout autre histoire, même déchu de son titre.

La nuit été tombée alors que Roan avait repris la direction de la ville. Certains auraient parlé d'un gamin capricieux à agir ainsi, mais pas lui. Si Polis avait la symbolique de la Coalition, ce n'était nul autre qu'une ville Trikru où Azgeda n'était pas réellement le bienvenu pour l'heure. Ou du moins ceux ayant un certain lien avec Nia. Les conneries de l’ambassadeur lui avaient fait friser la raison. Une idiotie alors qu’il aurait dû en deviner les conséquences avant même de prononcer ses paroles. Roan avait ménagé ses propres propos durant la Cérémonie afin d’éviter de telle situation. Et désormais, à cause de ce branwoda de bandrona, l’Azgeda voyait un peu plus sa liberté s’envoler.

Polis n’était pas très loin. Si sortir était de la folie, il ne l’avait pas poussé jusqu’à s’éloigner. Pourtant, son retour allait être retardé… par un gland. Sur le coup, il avait simplement senti un objet heurter le haut de sa tête, le faisant se stopper. Roan restait sur ses gardes, méfiant de découvrir, percher dans l'un de ses arbres, un gardien de la forêt. Les 'actifs étaient doués pour se camoufler au sein de la nature et le prince ne serait pas surpris de d'avoir des guerriers loyaux à la Coalition de part et d'autre du territoire Trikru. Non seulement pour assurer la sécurité de Polis, mais aussi pour assurer les ordres de Lexa qui avaient été de faire connaître la même sanction pour un crime envers Skaikru qu'un crime similaire envers un quelconque autre clan. Donner de l'importance à ce peuple tomber du ciel était une idiotie pour l'Azgeda. Ils envahissent les terres et étaient intégré à la Coalition. Rien ne leur assurait qu'ils n'étaient pas similaires aux Maunons, et l'extermination de ces derniers par Wanheda n'était en rien une preuve.

Mais dans ces arbres le surplombant, il n'y avait rien d'humain. À ses pieds, il cherchait à voir ce qui avait pu attirer son attention et il ne vit qu'un gland parmi la litière de la forêt, venant certainement d'un animal. Ignorant le fruit à coque, il reprit sa route, se rapprochant d'un point d'eau. Un repère parmi d’autres dont il se servait afin de ne pas se perdre dans l’immensité de la forêt. Cependant, et à croire ce que le prince recevait sur la tête, quelque chose souhaitait attirer son attention ou le détourner de là. Car après à peine quelques mètres, il sentit de nouveau un choc similaire au précédent pour découvrir un gland à ses pieds. Le prince ne comprenait pas. Après avoir de nouveau la tête, il ne distinguait rien dans les arbres semblable à une présence humaine. Par contre, après avoir baissé les yeux, il vit par-delà les buissons la présence d'une femme nue dans les eaux de la rivière. Du moins, est-ce qu'il aperçut avant que cette malheureuse ne disparût dans les eaux, happée par une quelconque créature y étant établi.

Sur le coup, Roan n'avait pas réellement eut le temps d'agir, mais il savait que certaines bestioles aquatiques étaient sans vergogne et savait aussi comment attirer leur attention. Récupérant une pierre au sol, il l'avait lancé plus loin comme pour signifier le plongeon d'une proie. Il perdait du temps en agissant ainsi, mais il n'était pas pressé de rentrer. Simplement, espérait-il que ce ne soit pas un Skaikru, sans quoi cette attaque serait une bonne leçon de leur méconnaissance de ces terres. Mais le prince semblait être dans un bon jour et se préparait à aider cette inconnue insouciante.

Polis n’était pas loin, mais la nuit était tombée depuis peu mettant un terme momentanément à leur progression. Les derniers jours de voyage avaient été éprouvants pour la rousse, elle se sentait très seule, ce qui était étonnant alors qu’elle était entourée de sa délégation. Elle avait cette terrible impression d’être un loup dans un troupeau de moutons, ce qui n’était pas totalement faux sachant que beaucoup suivaient aveuglément la reine Nia.
La demoiselle profita de la présence non loin d’un point d’eau pour tenter de se refaire un semblant de beauté. Elle ordonna aux gardes qui devaient la protéger de faire un peu de repérage afin d’éviter toute rencontre impromptue avec la faune locale.
Lorsque les gardes lui annoncèrent que la voie était libre, elle leur ordonna de rester dans les environs tout en lui laissant son intimité. Elle prit alors des affaires propres avant de retirer celles qu’elle portait, elle retira son plus précieux chargement de son sac.
- Coucou petit casse-noisette ! Tu me rendrais un service ?
La boule de poils qu’elle tenait dans ses mains se déplia pour laisser apparaître un petit écureuil semi-albinos. Il avait le corps blanc, mais sa tête, ses pattes ainsi que sa queue était roux. Mirage l’avait découvert presque mort de froid des mois plus tôt, ses parents avaient dû être dévorés par un prédateur. La demoiselle l’avait pris avec elle, elle l’avait nourri et éduqué. Il était son confident avec Beltane, sa jument, et étrangement, ils étaient de bon gardien de secrets.
L’animal dressa les oreilles semblant l’écouter.
-Peux-tu me servir d’alarme si jamais quelqu’un s’approchait d’un peu trop près ?
L’écureuil s’élança dans un arbre sans de mander son reste. L’Azgeda se tourna vers l’eau, bien qu’elle était sombre, elle restait attirante. La rousse retira ses vêtements pour entrer dans l’eau, contrairement à ce qu’elle pensait, cette dernière était encore tiède de la chaleur qu’elle avait acquis dans la journée. Elle soupira d’aise se laissant aller à la sensation de l’eau sur son corps.
Elle se lava rapidement, puis elle profita un peu de l’eau.
La jeune femme laissa libre court à ses pensées, oubliant légèrement où elle se trouvait.
Elle pensa aux dernières années écoulée depuis la mort de ses parents adoptifs, elle avait dû se rendre à la capitale d’Azgeda pour pouvoir être formée à devenir ambassadrice. Seulement, elle ne s’attendait pas à le devenir au bout de trois ans alors que l’ambassadeur précédent avait commis un incident diplomatique et en avait perdu la tête au sens propre comme au figuré. Elle avait donc une énorme pression sur les épaules, non seulement elle était attendue au tournant par Nia, mais également par Heda et toute la coalition. Elle détestait devoir jouer ce double jeu, elle aurait souhaité pouvoir pleinement exprimer ses idéaux, mais pour le moment elle ne pouvait que continuer à faire semblant d’être l'ambassadrice modèle et elle espérait réellement que les temps changent … Et vite.
Elle fut interrompue par un bruit dans les arbres, il était des plus discrets, mais ses sens de chasseuse ne la trompaient pas, il y avait quelqu’un et Scrat lui faisait comprendre qu’il y avait un intrus. L’Azgeda se retourna vivement se protégeant la poitrine, elle aperçut une silhouette sur les berges, mais elle ne put pas faire grand-chose si ce n'est pousser un cri, car quelque chose l’attrapa par le mollet et l’entraîna dans l’eau.
Le cri qu’elle avait poussé avait expulsé l’air de ses poumons si bien qu’elle se retrouva quasiment asphyxiée. Elle se débattit pour essayer de faire lâcher l’animal, ce geste désespéré fut accompagné le bruit d’un objet ou d’un corps entrant dans l’eau. L’Azgeda eut juste le temps d’apercevoir la forme longiligne et reptilienne s’éloigner, elle prit alors une impulsion au fond pour pouvoir remonter à la surface, elle prit une grande inspiration avant de remarquer une main qui se tendait devant elle. D’instinct, elle l’attrapa pour se retrouver propulsée contre une surface ferme et souple. Sous le coup des émotions précédentes elle ne put s’empêcher de craquer aussi honteux que ce soit pour une Azgeda.
-Je commence à en avoir marre de tout ça, marre des serpents et toutes ses créatures démoniaques des eaux. Tu dois y aller Mirage ! Sinon tu apporteras le déshonneur ! Déshonneur sur toi ! Déshonneur sur Azgeda ! Déshonneur sur ta jument ! Mais je n'ai rien demandé moi !
Elle releva la tête pour découvrir son sauveur, elle pâlit drastiquement en se rendant compte dans les bras de qui elle se trouvait, et surtout dans quelle tenue ou plutôt absence de tenue.
-Prince Roan Kom Azgeda.
Elle sortit de ses bras pour se draper dans sa serviette et le peu de dignité qui lui restait.

Certains pouvaient être surpris de voir Roan prêt à ce mouillé pour donner ce coup de main en distrayant la bestiole aquatique, offrant ainsi une chance à l'insouciante jeune femme. Pourtant, il prenait ce risque sans avoir rien à faire d'être remarqué ou non. Dans un sens, il y voyait un avantage da's le cas où il serait repéré hors des fro tiers de Polis, mais aussi dans le sens où il n'était pas aussi froid et insensible que sa mère. Être Azgeda ne voulait pas forcément dire laisser les autres mourir sans faire preuve d'humanité. Le prince était le "bienvenu" sur le territoire Trikru et il devait garder à l'esprit qu'il avait tout de même la chance de ne pas subir pire que ce qu'il subissait pour les outrages de feu l'ambassadeur de Nia. Quelle idée aussi de hurler au push contre Heda. Il aurait lui-même décapité cet abruti si Lexa ne l'avait pas fait.

Alors voilà, il se tenait prêt à aider la jeune femme, lui tendant la main afin de lui permettre de se hisser. La créature l'avait tout de même surprise et elle aurait pu avoir n'importe qui, y compris le meilleure des guerriers. L'eau était son domaine, il fallait avoir l'œil vif pour la voir surgir. Lui-même ne l'avait pas vu, ayant simplement assisté à la disparition de la baigneuse dans les eaux devenues troubles par l'activité. Baigneuse qu'il avait désormais tout contre lui, alors que celle-ci semblait maudire ce qui la menait là.

Des paroles qu'elle eut, ainsi que les marques présentes sur son visage et son dos, Roan su qu'elle n'était pas l'une de ses personnes récemments intégré à la Coalition. Ces Skaikru dont ils entendaient parler à tout-va. Le prince en était exaspéré, bien qu'il se faisait sur ses pensées. Devoir rester à Trikru signifiait être en territoire "ennemi" et il ne pouvait permettre à quiconque de retourner ses propos à son encontre. Faire attention à ce qu'il disait, contrairement à celle qu'il soupçonnait aisément de venir de sa nation de par ce déshonneur qu'elle évoquait, ainsi que les scarifications sur son visage. Faire attention à ce qu'il disait, contrairement à celle qu'il soupçonnait aisément de venir de sa nation de par ce déshonneur qu'elle évoquait, ainsi que les scarifications sur son visage. Situation qui eut raison d'un sourire de Roan alors qu'il fit preuve de respect en se retournant afin de lui permettre d'être plus à son aise.

« Et quel déshonneur pourrait bien tomber sur vous ? »

Un peu d'ironie, c'était la signature du prince, mais aussi sa façon d'en savoir plus à son sujet. La présence d'Azgeda dans les environs pouvait signifier beaucoup, et d'autant plus alors que Lexa avait mené une action à l'encontre de Nia. Roan doutait que sa mère ignore cela et il restait à l'affût d'une quelconque action de sa part.

« Que fait donc une Azgeda seule dans la forêt Trikru ? Ma mère mettrait elle sur pied lune de ses folles idées ? »

Il avait beau être prince, Roan se permettait une telle remarque au sujet de sa mère. Et s'il avait tendance à dissimuler son identité lors d'excursion telle que celle-ci, Mirage l'avait reconnu, alors autant ne pas jouer au plus idiot.

Mirage profita du fait que le prince lui tourne le dos, lui offrant un peu d'intimité pour s'habiller. Elle enfila ses sous-vêtements avant de regarder les dégâts causés par l'affreuse bestiole et ce n'était pas des plus joli.

-Bordel ! Je hais les serpents ! Pour répondre à votre question, mon déshonneur sera total si je ne suis pas capable de réparer les conneries de Corka.

Elle récupérera sa sacoche où se trouvait son matériel de soin. Elle prit de quoi nettoyer la plaie et commença son travail. La jeune femme décida de l'autoriser à se retourner, après tout, il l'avait vu nue alors en sous-vêtements cela n'allait pas la tuer.

-Vous pouvez vous retourner, je suis à peu près présentable. Je manque également à mes devoirs. Je suis Mirage, la malheureuse victime que votre mère a désignée comme étant la nouvelle ambassadrice d'Azgeda. En espérant que je n'échoue pas lamentablement.

Tout en parlant elle continua à soigner sa plaie, celle-ci n'était pas profonde, mais elle saignait beaucoup. Ce qui inquiétait le plus la rousse, c'était la présence ou non de venin. Elle prit le temps de réfléchir et de se souvenir de l'attaque. Celle-ci bien que rapide, avait plus été une tentative de noyade qu'une attaque éclair propre aux animaux venimeux. La jeune femme banda donc sa jambe une fois la blessure propre.

Elle enfila ensuite un pantalon, un haut ainsi qu'un serre taille avant de pleinement se concentrer sur son interlocuteur.

- Merci de m'avoir sorti de l'eau. Puis-je savoir pourquoi vous êtes ici ? Non pas que cela soit un reproche, mais vous ne devriez pas être "enfermé" à Polis ? Heda est-elle autant sous le charme de cette nouvelle nation qu'elle en oublie que vous êtes le prince d'Azgeda, qui si ma mémoire est bonne fut le grand ennemi de Trikru ?

La rousse regarda son prince, elle ne l'avait jamais rencontré avant. Mais son père adoptif lui en avait toujours parlé en bien. D'après lui, c'était quelqu'un de courageux et bon, qui serait un meilleur roi que la reine actuelle ce qui expliquerai pourquoi elle l'avait banni sans réelle raison. Tous les récits de son père sur ce guerrier avaient été les déclencheurs d'une grande admiration chez la demoiselle, on pouvait sans trop de mal qualifier cela d'amour.

Actuellement, elle se trouvait stupide d'aimer un homme dont elle ne connaissait que peu de chose et qui se trouvait face à elle. De plus au vu de la situation précédente, il devait avoir une piètre opinion d'elle.

Soudain, un poids se fit sentir sur son épaule, elle leva la main sans quitter Roan des yeux pour trouver le contact de la douce fourrure de Scrat.

- Coucou toi ? Le salua t’elle. Sais-tu où se trouve la garde que m'a imposé notre reine ? Je ne tiens pas à ce qu'ils tombent sur notre sauveur.

Le petit animal regarda le prince avant de repartir dans les arbres. Mirage coupa le contact avec Roan pour suivre des yeux la petite boule rousse qui partait de branches en branches.

On pouvait dire du prince qu'il était parfois un ours mal léché, mais il savait être respectueux des autres dans certaines situations et la condition qu'il le veuille bien. C'est pour cela qu'il s'était retourné, laissant alors à l'Azgeda un minimum d'intimité. La nudité ne le dérangeait pas, mais il connaissait assez le caractère virulent de son peuple pour ne pas risquer un retour de poing dans le cas où cette dernière avait le sang chaud. Situation qui aurait pu s'avérer amusante, tandis qu'il aurait cherché à bloquer le coup, ce qui aurait créé certainement plus de gêne pour la demoiselle. Mais non, Roan avait évité cet enchaînement en s'offrant la vue des arbres, hésitant même à continuer son retour vers Polis. Ce qui le retenait de le faire, était avant tout ses interrogations, alors qu'il se demandait ce que pouvait bien manigancer sa mère quant aux derniers événements. Interrogation dont une partie des réponses fut apportée parmi les véhémences de la jeune femme.

Lorsque le feu vert lui fut donné de se retourner, l'Azgeda ne se fit pas prier. Il pouvait faire preuve de bonne foi, mais il ne comptait pas offrir son dos à une quelconque fourberie liée à la Nation des Glaces. Il était bien trop simple d'amadouer une cible en jouant le jeu de la jeune femme en détresse qui pouvait parfaitement cacher une arme non loin dans les fourrées. Alors qu'il ne pouvait se fier à sa vision en cas d'attaque masquée, Roan avait été attentifs aux bruits de la forêt. Mais la baigneuse ne semblait guère menaçante, s'évertuant à râler sur les ordres de la reine tout en soignant sa plaie. Une bonne idée alors que la créature aquatique aurait pu lui arracher la jambe.

« Une ambassadrice sans sa garde alors ? »

Un coup d’œil autour d'eux confirmait à Roan l'absence des hommes armés devant pourtant assurer la garde de la nouvelle ambassadrice. D'un regard, il avait d'ailleurs jaugé cette dernière. Si son bannissement l'éloignait de la politique de son clan, il n'en restait pas moins attentif à son évolution. Et c'était donc désormais ce petit bout de femme qui allait représenter la sanguinolente et terrible reine des glaces face aux autres clans. Les plus idiots penseront pouvoir la dévorer en un rien de temps au sein du conseil, mais étrangement, il doutait guère qu'elle ne se laisse faire. Du peu qu'il avait entendu de cette petite ambassadrice, elle avait de la ressource verbale et bon nombre allait s'en mordre les doigts.

Cette Mirage n'avait pas la langue dans sa poche. Le prince avait déjà fait face à certaines personnes craignant trop ses réactions pour réellement dire ce qu'ils pensaient. Là, la jeune femme n'hésitait pas à pointer du doigt cette sortie, pas réellement autorisée, qu'il menait.

« Heda se laisse aveugler par sa volonté d'intégrer Skaikru. Corka s'est d'ailleurs saisit d'une faille qu'elle a ouverte. Ne commets pas cette erreur. »

Il n'avait pas à se justifier auprès d'elle sur sa présence ici. Ni auprès de qui que ce soit d'ailleurs. Lexa peut-être, mais ce qu'elle ignore ne pouvait que lui faire du tort. En réalité, Roan ne rendait de compte à personnes. Les gardes, qui lui étaient assignés, étaient en partie corrompus par ses soins afin d'être libre de ses mouvements et seul l'illusion persistait à croire que Trikru avait de l'emprise sur le prince banni.

Puis un écureuil se joignit au duo, formant une petite troupe. Roan eut un froncement de sourcil, se souvenant des glands qu'il avait reçus sur la tête plus tôt. Il se demandait s'il y avait un lien entre l'animal et cet... incident, alors que la jeune femme s'adressait au rongeur. Ce point, il l'éclaircirait plus tard, tandis qu'une pointe de sarcasme vint du prince.

« Si vous croyez que cette boule de poil va vous répondre, la neige tombera alors sur les terres de Sangedakru. »

C'était tout lui ça, il ne pouvait s'empêcher cette pointe d'ironie alors que l'écureuil en question partait dans les arbres.

Mirage observa son prince, elle admirait le fait qu’il lui laisse un minimum d’intimité, elle détestait ces personnes qui se croyaient au-dessus de tout et se permettaient de le reluquer les autres comme si c’étaient de vulgaires bouts de viande.

La demoiselle n’avait jamais connu d’homme au niveau intime, pas qu’elle n’était pas attirée par eux, mais parce qu’elle n’avait pas trouvé le bon. De plus, son poste d’ambassadrice auprès de la reine ne l’aidait pas à se trouver un compagnon. Elle se déplaça tout en faisant attention à ne pas paraître menaçante, quoique vue la situation précédente, elle ne devait pas réellement impressionner l’homme en face d’elle. La jeune femme prit ses vêtements dans son sac, elle en sortit une robe en tissus de couleur marron qu’elle enfila, cachant son corps à la vue de son interlocuteur, et qui lui arrivait mi-cuisse. Elle passa ensuite un léger serre taille en cuir qu’elle laça avec facilité, elle enfila une cape légère et compléta sa tenue par une ceinture où était fixé un poignard. Elle sourit désabusée en remarquant son arme, elle qui ne la laissa que rarement hors de portée, avait fait preuve de grande négligence en la laissant dans son sac.

Elle tiqua lorsque le beau mâle face à elle lui fit la remarque sur le fait qu’elle n’était pas accompagnée de sa garde.

-J’avais deux gardes, mais je crains qu’ils n’aient trouvé mieux ailleurs ou qu’ils n’aient fini dans l’estomac de mon agresseur. Ce qui explique pourquoi personne n’est venu me porter secours à part vous.

Elle regarda en direction de l’eau qui était redevenue calme, seulement perturbée par le souffle du vent. Elle s’en voulait d’avoir cédé à l’appel de cette eau d’apparence tranquille, certes sans cette affreuse expérience elle n’aurait pas pu terminer dans les bras de ce beau prince charmant, mais elle s’en serait passée.

- Oui, j’aurais pu avoir mon arme sur moi pour me défendre, mais je ne m’attendais pas à ce que le danger arrive de l’eau. On n’a pas ce genre de bestiole à Azgeda… Ils sont fous ces Trikru. À dire vrai, je ne sais pas pourquoi notre reine m’a nommé ambassadrice pour Azgeda. Est-ce parce que je suis la fille de deux de ses meilleurs chefs de guerre ? Ou souhaite t’elle me voir échouer et subir le même sort que Corka et par conséquent se débarrasser d’une potentielle rebelle. Après tout, je n’ai pas été élevée par les plus grands fans de notre reine. Ils étaient plutôt du genre à suivre votre grand-père.

Suite à ces révélations quelques peu dangereuses, la jeune femme regarda la cime des arbres à la recherche de son écureuil. Ce qu’elle venait de révéler à son prince n’était qu’un secret de Polichinelle, elle ne doutait pas que la capitale d’Azgeda fût au courant de l’identité de ses parents adoptifs.

- Concernant Heda… Je ne saurais trop me prononcer, c’est la première fois que je me rends à Polis. Tout comme ce qui est des Skaikru … Je n’ai jamais eu la chance ou la malchance d’en rencontrer. J’étais dans mon village quand ils sont tombés sur notre territoire. Ils ont été en grande partie décimés avant que je ne puisse en rencontrer, après je pense que vous devinez qu’ils n’étaient pas des plus faciles à approcher, après tout, ils ont envahis notre territoire, c’était légitime… Quoi qu’un peu trop extrême.

Un poids plume tomba de nouveau sur son épaule, l’Azgeda, elle grattouilla mécaniquement son animal.

-Pour ce qui est de sa faculté de réponse, certes, il ne me répondra pas avec des mots, mais il a été plus loquace que l’ensemble de la garde que la reine m’a imposée.

Elle ajouta avec un léger amusement.

-N’avez-vous jamais dialogué avec la nature ? Avez-vous tous perdu cette tradition que nous avions, nous les Azgeda, d’être proche de la nature et de célébrer la chasse ainsi que la lune ? Pourtant, elle reste présente sur notre peau.

La demoiselle passa pensivement ses doigts sur le croissant de lune qu’elle avait sur le front. Elle donna un gland, qu’elle avait ramassé, à sa boule de poils. Elle siffla trois notes distinctes, un trot se fit entendre ainsi que deux autres.

L’Azgeda caressa tendrement la tête de sa jument, cette dernière, avec Scrat, étaient les deux seules bouffées d’air dans ce monde de brute. Elle sourit doucement en regardant la robe de sa jument puis son prince, après tout, ils étaient « Roan » tous les deux, blue roan pour Beltane, mais roan quand même.

La jeune ambassadrice était désormais vêtue décemment. La situation aurait pu devenir gênante si les vêtements de la miss avaient disparu, bien que cela ne soit pas le cas. Ainsi, ses gars avaient dû se faire dévorer, piètre image pour des Azgeda. Roan n’en était pas des masses surpris. Certains guerriers se croyaient en territoire conquis de par l'alliance mise en place par la Coalition et ils avaient tendance à oublier les dangers de la nature. Les plus philosophes disaient sur l’homme était son propre prédateur, mais les monstres surgi suite à Praimfaya n’était pas à sous-estimer non plus. Mirage avait manqué d’en faire les frais d’ailleurs, bien qu’elle ne s’en laissait pas démonter. Une fois la surprise passée, il l’avait vu reprendre de son aplomb tout en maudissait sa nation. Ce qui avait amusé le prince, rare était ceux prenant ce risque.

« Ils ne sont alors que de pauvres idiots pour ne pas avoir su faire face aux dangers de Trikru. Azgeda se portera bien mieux sans eux. »

Roan se permettait sans aucun gène de critiquer les gona de sa mère. S’il rendait honneur à ceux mourant au combat, tout dépendait du mérite de ces derniers. Et mourir aussi bêtement ne méritait tout simplement aucun honneur.

Il se fit silencieux lors de la justification de Mirage quant à l’absence d’arme. À vrai dire, le prince n’était pas là pour lui faire une leçon de moral, mais il découvrait l’esprit tactique de la jeune femme. Elle reconnaissait l’erreur d’être désarmé, mais aussi la logique de ne pas l’être durant un bain. Elle ne semblait pas être aussi naïve que son faciès pouvait laisser croire et Roan ne pouvait qu’en être satisfait. Si pour l’heure il n’avait plus aucune influence pour Azgeda, il n’en restait pas moins intéressé par ce qu’il adviendrait de son peuple. Hors, représenter un clan n’était pas une mince affaire et il n’y avait qu’un pas entre la frontière entre être le loup parmi les loups, ou la pauvre brebis prête à se faire dévorer. À l’observer ainsi, le prince penchait plus pour la première option.

« Il n’est pas recommandé de chercher à comprendre la stratégie de notre Azplana. Certains y ont perdu leur esprit. »

Roan avait laissé un léger sourire sarcastique prendre place sur son visage. Il ne se gênait pas pour commenter les actions de sa mère, s’étant déjà opposé à elle plus d’une fois. C’était d’ailleurs la raison de son interdiction de remettre les pieds à Azgeda, alors qu’elle avait fini par le considérer comme une menace. Une punition des plus honteuse dont il s’acquittait depuis trois ans.

Et il ne semblait pas être le seul à ne pas apprécier certaines idées de Nia. Les propos de Mirage lui avaient fait légèrement hausser les sourcils, surpris de la voir s’exprimer sans crainte, mais appréciant aussi de voir un certain caractère pointer sous cette douceur apparente. Elle devait être surprenante lorsqu’elle était poussée dans ses retranchements.

« Nia ne choisirait pas n’importe qui pour la représenter auprès de Lexa. Vous avez dû lui taper dans l’œil, sans qu’elle ne tienne forcément compte de votre filialité.

Il suffisait de voir ce qu’elle se permettait de faire à son propre fils. Il doutait que la miss ait été choisie pour des parents hauts placés ou tout autre chose. Elle devait par contre faire ses preuves désormais et Roan comptait bien profiter de sa présence à Polis pour voir si elle pouvait être une potentielle alliée. Elle faisait preuve d’une pensée posée et réfléchie. Ses arguments pouvaient être compréhensibles et s’il pouvait tiquer au début face à ses dires sur Skaikru, il n’en fit rien de par la suite. Elle avait raison et, pour une fois, il considérait que Nia avait bien agi. Skaikru n’avait pas demandé la permission et qui sait ce qu’ils se seraient approprié si leur reine ne les avait pas détruit. Il suffisait de voir comment ils s’installaient à Trikru pour comprendre leur sans-gêne. Découvrir une ressemblance avec les Maunons ne le surprendrait même plus.

« Vous me ferez un affront de le penser. Il dans le devoir d’un prince de connaître les coutumes de son clan. »

La lune était même incrustée par deux fois aux travers des stigmates de son visage. Des marques apparurent des suites de son apprentissage comme gona, montrant à tous qu’il était désormais un homme d’Azgeda. Mais stigmates qu’il avait dû dissimuler plus d’une fois pour le bien de sa sécurité, sachant que des partisans de sa mère n’auraient pas hésité un instant à l’éliminer. Il était aussi maudit que ces frikdreina que tous haïssaient pour leur rejet marqué par la différence.
Des chevaux les rejoignirent suite à un ordre de la jeune femme. Il aurait été étonné que la nouvelle ambassadrice et sa garde ne face la route à pied. Pas qu’il doutait de son endurance, mais bien qu’Azgeda soit frontalier avec Trikru, la précipitation de la mort de son prédécesseur ne laissait que peu de temps pour répondre. Il se méfiait d’ailleurs d’une réponse de sa mère à cet outrage, sans pour autant l’évoquer pour l’heure.

« Vous revoilà en bonne compagnie afin de rejoindre Polis. »

Bien que la capitale soit désormais assez proche pour la rejoindre à pied, mais il doutait que la jeune femme ne laisse les équidés en vagabondage.

L’ambassadrice fut rassurée de pouvoir passer les doigts dans les poils de sa jument, elle avait eu peur qu’il lui soit arrivé quelque chose. Elle regarda de nouveau son prince.

-Je ne voulais pas insinuer que vous ne connaissiez ou que vous le pratiquiez plus nos coutumes. Seulement, beaucoup ont tendance à ne plus les pratiquer. Après, je viens d’un petit village d’Azgeda, nous mettons un point d’honneur à rester proches des coutumes et en plus de ma formation de guerrière, j’étais destinée à devenir la prêtresse de notre village.

Mirage regarda autour d’elle, elle n’était pas à sa place ici, elle ne savait pas si elle allait réussir cette mission ou si elle allait suivre la voie de ses pauvres bougres qui avaient perdu la vie si pathétiquement. Elle avait l’impression de porter la nation des glaces sur ses épaules, pourtant elle n’était pas reine, ni héritière comme l’homme en face d’elle, mais elle savait qu’un seul faux pas et cela pouvait être la catastrophe, l’exemple de Corka était le plus parlant.

-Vous devez avoir raison en ce qui concerne votre mère, ou alors elle a quelque chose en tête et qui est son ambassadeur ne représente rien et elle se fiche comme une guigne de qui elle va sacrifier voir elle va faire d’une pierre deux coups : éliminer quelqu’un de gênant et sacrifier son ambassadrice.

Elle s’approcha ensuite des deux montures de ses gardes, elle caressa leur pelage, elle avait dans l’idée de les confier à la délégation pour qu’ils les vendent ou qu’ils les gardent. Elle sourit à la réflexion du prince concernant la bonne compagnie qu’elle récupérait. Elle installa ses affaires sur le dos de sa jument.

-Je vous proposerais bien de m’accompagner mais je ne suis pas sûre que passer par la grande porte mais je pense que cela ne soit pas judicieux alors que vous ne devriez pas être dehors.

Elle fit alors une révérence à son prince.

-Je crains que ce soit ici que nos chemins se séparent. Je vous remercie de m’avoir sorti de ce mauvais pas. En espérant que nous puissions nous croiser à Polis et puisse le sort vous être favorable.

Mirage monta sur sa monture avant de s’éloigner du beau prince.