Marais Trikru

La nuit s'apprêtait à tomber sur la forêt Trikru, tandis que Roan envisageait de faire une halte pour la nuit. Depuis quelques jours, il était beaucoup plus méfiant quant à ses choix de routes. Même si de par son statut de prince, il pouvait ne rien risquer, il était aussi un banni que certains voudraient éliminer. Seulement, cette connaissance était loin de l'effrayer et cela ne l'avait empêché de voyager depuis le poids de cet exil forcé et déshonorant. Roan s'assurait simplement à ce qu’il ne soit découvert, masquant ses croissants de lune grâce à ses cheveux, lui permettant de ne pas s'attirer de fâcheux ennuis. Il avait déjà bien assez à faire avec les dangers qui caractérisaient la nature et les possibles mauvaises rencontres qu'il pouvait avoir. Ce monde qu'avait laissé Praimfaya était loin d'être inoffensif et il n'existait pas à prendre la vie du premier faible qui faisait preuve d'inattention. Or, lui ne faisait pas partie de ces faibles et comptait bien réussir la mission qu’il s’était donné.

Et la nuit pouvait s'avérer bien plus dangereuse qu'en journée, alors Roan favorisait les endroits où il pouvait avoir une vue d'ensemble lorsqu'il faisait hâte. Après tout ce à quoi il avait survécu, il refusait de se laisser prendre bêtement par un danger qu'il n'aurait anticipé. Ainsi, depuis que les ténèbres de la nuit avaient commencé à s'affaisser parmi les arbres, le prince était à la recherche d'un de ces lieux où un semblant de sécurité était possible. Cependant, il n'avait encore rien trouvé de tel et avait continué sa route vers le nord.

Voyager à pied ne l'aidait pas à parcourir de grande distance chaque jour, mais on ne lui avait guère laissé le choix d'emmener un destrier lors de son bannissement. Cela aurait été faire preuve de trop grande preuve de gentillesse pour la personne qu'était Nia. Et depuis qu'il se trouvait à vivre en se déplaçant constamment, le prince n'avait pas cherché à attirer l'attention sur lui en acquérant un cheval. Il aurait pu tenter de négocier un accord avec un clan qui aurait des griefs envers la reine d'Azgeda, mais avec cette trahison dont il avait fait preuve, en échange de sa place, envers la coalition, cela ne jouait en faveur de personne de commercer avec le prince banni. Et Roan n'était pas un de ses Sanskava qui finissait par trouver refuge dans la fameuse Dead Zone, acceptant leur sort. Il était peut-être reconnu comme n'appartenant plus à aucun clan, en son cœur il était toujours d'Azgeda et agissait pour le bien de son peuple.

Un bruit plus loin attira l'attention de Roan, le sortant de ses réflexions au sujet de son bannissement. Cela aurait été bien trop simple que son voyage se fasse sans encombre, mais il n'allait pas jusqu'à dire qu’il en était effrayé, par cette marque de présence. C’était quelque chose de peu anodin et encore moins lorsqu’il voyait ce à quoi les arbres avaient peu à peu laissé place. Trikru était certes connu pour son immense forêt, mais cette même forêt abritait des lieux insoupçonnés tel que ce marécage qui l’empêchait d’établir un frugal bivouac pour la nuit. Et ce bruit qui lui était parvenu était semblable à un bourdonnement qu’il n’eut aucun mal à identifier. Non loin, devait certainement se tenir un essaim de ces saloperies de mouches porteuse de nombreuses bactéries mortelles dont il se serait très bien passé. Cependant, les bestioles semblaient bien présentes et le prince allait devoir redoubler de méfiance. Il était hors de question que l’une de leurs maladies viennent jusqu’à lui et le contamine. Déjà, lorsqu’il avait l’assurance d’être reconnu pour celui qu’il était, l’Azgeda appréciait guère de se faire avoir par ces mutations et son point de vue à leurs sujets n’avaient nullement changé avec le temps.

Cependant, alors qu’il aurait pu rebrousser chemin pour ne pas avoir affaire à cet essaim, il ne le fit pas. Un nouveau bruit se fit entendre derrière et, sans qu’il ne se retourne réellement pour voir ce que cela pouvait bien être cette fois-ci, un craquement lui permit d’identifier le pas d’une personne qui ne semblait pas se rendre compte de ce vers quoi elle se dirigeait. Cela aurait pu paraître des plus insignifiants pour lui, si sa présence ne risquait pas d’attirer ce groupe de nuisible qu’il avait repéré. Seul, il pouvait passer inaperçu, mais à deux dans ces bois, cela s’avérer plus complexe.

Alors, avec toute la délicatesse dont il savait faire preuve, il avait attendu, camouflé par un arbre, que l’inconnue soit suffisamment proche afin de l’attraper et plaquer une main sur sa bouche pour éviter que tout cris n’attire leur présence.

« Yu souda ron we. »
{Tu devrais fuir}

Cela était peut-être la solution la plus efficace face à ces bestioles qui pouvaient s’avérer être de véritable teigne. Roan se fichait d’aider ou non la personne, mais s’éloigner de l’essaim semblait la solution la plus efficace et il valait mieux ne pas perdre de temps. Seulement, il fallait tout de même faire attention, car qui sait ce que les marais pouvaient révéler comme piège.

Le chemin allait être long et périlleux avant que Noha n’arrive vraiment à changer. Et la jeune fille le savait parfaitement. Elle était toujours cette fille peureuse et incapable de se battre. Mais, maintenant que sa vision des choses commençait à évoluer, elle se rendait bien compte qu’elle ne pouvait plus agir comme elle le faisait. Il fallait qu’elle mette sérieusement la main à la patte, si elle ne voulait plus rester dans cet état dépressif plus longtemps.
C’est pourquoi, elle décida de proposer son aide pour aller récolter de quoi manger avec le groupe qui sortait. Évidement, sa demande fut d’abord refusée. Mais parce qu’ils manquaient de monde et que la brune insistait un peu trop, ils finirent par la laisser faire. À condition qu’elle ne lâche pas le groupe, et qu’elle obéisse au doigt et à l’œil au chef désigné.
Ils partirent rapidement, marchant sur plusieurs kilomètres. Comme promis, la jeune fille resta à sa place et ne fit aucun écart. Mais elle aurait menti, si elle avait dit que ce qu’elle voyait ne la fascinait pas. Bien sur, elle avait déjà vue le monde extérieur lors de leurs premiers pas sur la terre. Mais cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas marché dans la nature profonde, préférant la sécurité de leur campement de fortune. Elle perdait facilement le rythme, et se retrouva essoufflé. Mais elle fit de son mieux, jusqu’à ce que le groupe s’arrête. Ils avaient trouvé un bon endroit pour récolter des provisions. Noha reprit doucement son souffle, épuisé. Mais elle ne perdit pas de temps, les autres ayant déjà commencé leur tâche. Elle resta concentré sur sa tâche, chaque membres du groupe s’éloignant peu à peu, selon l’endroit où ils devaient cueillir. Pas trop loin non plus, mais assez pour pouvoir se partager la tâche, et fouiller le secteur sur une grande partie.
Mais Noha se perdit rapidement dans ses pensées. Préoccupé par les derniers événements, qui l’avaient poussé à se bouger. Elle ne vit pas que la nuit avait rapidement prit place, et que les autres avaient commencé à avancer. Ce ne fut que quand elle reprit ses esprits et qu’elle referma correctement son sac qu’elle se rendit compte qu’elle était seule. Toute seule. Naturellement, elle paniqua. Comment avait-elle fait pour perdre en quelque seconde son groupe ? Elle se leva, regardant autour d’elle. Entendant du bruit non loin d’elle, elle se décida à avancer. Ce n’était peut-être pas une bonne idée. Mais vu sa situation, ne rien faire n’était pas non plus la meilleur des solutions. Elle devait au moins tenter quelque chose, si elle voulait retrouver les autres !
Elle avança alors, sans se rendre compte de ce qui pouvait l’attendre devant elle. La nuit lui camouflant à moitié la vue, elle marchait lentement, essayant de toucher les arbres pour s’aider. Et avant qu’elle ne puisse aller plus loin, une main s’accrocha à son avant-bras et la tira en arrière. Elle n’eut même pas le temps de hurler, une main se plaçant contre sa bouche. Dans un instincts de survit, la petite essaya de se dégager en bougeant dans tout les sens et en essayant de crier. Bien évidement, le guerrier qui la tenait était bien trop fort et Noha pouvait à peine bouger. Sans compter que sa bouche, étant prisonnière, ne pousser des gémissements aussi crédibles que ceux d’un chiot effrayé. Il s’adressa à elle, mais cela ne fit que la paniquer encore plus. Elle ne comprenait rien à ce qu’il lui disait. Au bout d’un moment, elle arrêta de bouger et abandonna. Elle ne pouvait que trembler dans ses bras, essayant de se retenir de pleurer. Il allait la tuer très rapidement, à ce rythme.
Sa peur était telle qu’elle n’arrivait pas à entendre le bruit que produisait les étranges bestioles dont le grounder voulait l’éloigner. Alors, elle attendit. Sans comprendre ses intentions. Ayant juste un prénom, qui défilait à répétitions dans ses pensées.
- Aco ...

Roan n'avait pas été des plus tendres avec la personne à qui il avait évité une rencontre des plus malencontreuse avec ces bestioles nuisibles se trouvant non loin. Il n'était pas surpris de voir qu'il avait effrayé ce qui semblait être une gamine, Skaikru au vu de sa tenue. Il la tenait avec force pour qu'elle ne puisse se dégager et prendre le risque d'attirer l'attention sur eux. Le prince ne se souciait nullement d'elle. Si elle se mettait en danger, elle serait seule responsable, mais il ne tenait pas à goûter le prix de son ignorance de ces forêts et marécages.
Face aux mouvements de la Skaikru, il ne cédait pas. Il en fallait bien plus pour réussir à lui échapper et le prince attendait qu’elle se calme pour retirer sa main. Il restait méfiant, il ne voulait pas l’entendre hurler. Roan avait pensé à l’assommer si elle ne se calmait pas, mais la volonté de la jeune était bien moindre que la sienne tandis qu'elle abandonnait l’idée de se libérer. Un sourire s’était formé chez Roan, satisfait de ne pas avoir à se battre avec elle. Il ne la craignait pas, un coup d’œil sur sa carrure lui assurait déjà la victoire, mais encore une fois, cela aurait été un risque des plus inutile. L’essaim pouvait toujours rappliquer rapidement et ces nuisibles volants seront toujours plus rapides que lui.
« Du calme. »
Cette fois, il s’était adressé à elle en gonasleng, cette langue comprise par le peuple du ciel. C’était plus un ordre qu’un conseil, l’Azgeda ne voulant pas perdre plus de temps. Il avait relâché sa pression sur l’adolescente, tout en restant à l’affût de quoi que ce soit de sa part. Il trouvait la présence du peuple du ciel des plus ridicules et ne comprenait pas pourquoi Lexa ne les avait pas encore chassés. Ils manquaient de connaissances, prenaient pour acquis leur croyance d’un monde ayant évolué et étaient bien trop semblables aux Maunons. Mêmes armes, même technologie, même façon de vivre reclus derrière leur forteresse de métal. Pour le guerrier, ce n’était qu’une question de temps avant qu’une nouvelle ère de crainte ne s’installe.
Mais d’un autre côté, il n’allait pas se plaindre. La présence de ce peuple offrait une occasion en or pour Roan de retrouver son titre de Prince. Wanheda, l’une des leur qui était tant convoité depuis sa destruction de la Montagne. Lui aussi la recherchait, afin de l’offrir à celle qui pourrait faire pression sur Nia. C’était risqué que de s’opposer à la reine des glaces, mais Roan n’avait que faire de ce danger.
Il finit par tirer la Skaikru afin de s’éloigner du réel danger de cet instant présent. Il n’avait alors rien expliquer, tenant l’adolescente d’une poigne ferme pour qu’elle le suive. Certains pouvaient appeler ça de la bienveillance, pour lui s’était surtout une assurance. Ne pas la voir courir droit sur cet ennemi naturel et alors semer la pagaille.
« Arrête de paniquer, je ne vais pas te tuer. »
Il était encore un peu brusque en disant cela, mais il l’avait senti trembler. Il est vrai que le prince n’était pas le natif qui inspirait le plus confiance, mais il n’était pas non plus un reaper, ces monstres de la Montagne capable de dévorer ses semblables. Il n’allait pas croquer cette brindille qu’était l’adolescente, simplement s’assurer qu’il n’y aurait plus de danger, du moins pour lui. Pour elle, s’était une autre affaire…
« Tu te dirigeais droit vers un essaim de mouches qui t’aurait tué au moindre contact. »
Ça aurait fait un Skaikru de moins, mais ça, il le gardait pour lui.

Noha ne pouvait qu’attendre en restant la plus silencieuse possible. Espérant de toutes ses forces que natif accepte de la relâcher rapidement. Que pouvait-elle faire d’autre, de toute manière ? À par verser des larmes silencieuse, pas grand-chose. Mais elle se calma d’un coup, tandis qu’il reprit la parole. Avait-elle rêvait ? Ou cet homme venait bel et bien de parler anglais ? Inconsciemment, la petite obéit pour ne plus faire un seul geste. Elle se laissa faire, tel une poupée de chiffon. Sans même remarquer que son kidnappeur avait dé-serré son emprise sur elle.
Ils s’éloignèrent rapidement. Beaucoup trop rapidement pour Noha, qui ne comprenait plus rien. Où voulait-il l’amener ? Elle regarda autour d’elle, essayant de voir si elle ne reconnaissait pas l’endroit par lequel ils passaient. Mais rien ne pouvait la guider. Était-ce la peur qui lui brouillait l’esprit ?
En tout cas, elle passa rapidement à autre chose en entendant le gros gaillard lui dire qu’il ne comptait pas la tuer. Enfin une bonne nouvelle ! S’accrochant bien vite à ce faible espoir, les tremblement de la petite se calmèrent peu à peu.
Ces derniers disparu totalement lorsqu’il parla à nouveau. Noha eut comme un bug durant un instant. Ses pensées s’étaient arrêté d’un coup, le temps qu’elle comprenne vraiment ce qu’il venait de dire. Des mouches tueuses ? Mais alors … il venait de la sauver ? Mais pourquoi ?
La petite fut encore plus perdue qu’au départ. Les natifs n’étaient-ils pas censé haïr tout les 100 ? Alors, pourquoi l’avait-il aidé ?
Ne pouvant avoir de réponse, et sa bouche étant toujours recouverte, un long silence régna entre les deux individus. Et ils restèrent un moment ainsi, l’adulte se contentant de marcher sans rien dire de plus. La brune se posa alors une nouvelle question. Savait-il aussi écrire en leur langue ? Rien ne pouvait le prouvait à la jeune fille. Alors, elle fit un teste. Au risque de paraître idiote.
Elle bougea une de ses mains, posant un doigt sur celle de son interlocuteur. Celle qui recouvrait une bonne partie du visage de la petite. Elle caressa la peau, dessinant des lettres de son propre alphabet dessus. Jusqu’à ce qu’elle arrive à ce qu’elle voulait écrire.
«T-H-A-N-K-Y-O-U »
L’avait-il compris ? Elle ne pu le savoir, ce dernier n’ayant pas du tout réagit. En tout cas, la petite n’avait vu aucune réaction. Il regardait toujours droit devant lui, avançant en silence.
Étant quand même contente d’avoir réussit à le remercier, elle remit sa propre main à sa place et attendit qu’il la libère totalement. Elle n’éprouvait, à présent, plus aucune peur pour cet inconnu. Elle n’allait quand même pas se jeter à son cou à chaque fois qu’elle le croiserait. Mais, au moins, elle pouvait lui accorder sa confiance.
Agissait-elle avec beaucoup trop de naïveté ? Sans aucun doute, oui. Surtout vu le monde dans lequel ils vivaient. Mais ça, Noha ne s’en préoccupait pas trop. Bien qu’elle ne voulait plus rester dans la case « petit être fragile, incapable de se défendre », elle ne voulait pas non plus changer de personnalité. Elle était toujours cette fille souriante, qui se préoccupait des autres, et qui n’avait pas que la survit comme raison de vivre. Elle voulait juste être utile, espérant que la paix allait enfin arriver sur leur nouvel habitat.
Ce n’était donc pas à ce moment là qu’elle allait se méfier d’une personne lui offrant un peu de gentillesse. Pour le plus grand malheur de beaucoup de Skaikru.

Ce n'était pas commun de voir le prince d’Azgeda se soucier de sauver ou non quelqu'un. Encore moins une Skaikru d'ailleurs. Alors pourquoi avait-il empêché cette gamine de se jeter droit dans l'essaim de ces mouches mortellement malade ? Il n'en avait aucune idée. L'instinct l’y avait poussé et il avait éloigné cette enfant sans lui laisser l'occasion de riposter ou quoi que ce soit d'autre. Lui-même n'avait que très peu pris la parole, expliquant rapidement ce qu'il se passait. Il ne voulait pas non plus d’une feuille tremblante le temps de s’assurer qu’il ne craignait rien.
Car peut-être était-ce aussi pour lui qu’il l’avait sauvé. Si elle avait attiré ces ignobles insectes, ils auraient pu, par la suite, s’en prendre à lui. En éloignant la Skaikru, il s’assurait de ne pas avoir de facteurs externe à lui pouvant attirer ces bestioles. Cela pouvait être une raison qui se faisait peu à peu dans son esprit et qui lui semblait plausible.
Alors qu’il s’était éloigné, la tenant toujours, un geste la jeune le fit froncer les sourcils. Il n’affichait pas plus de réaction, concentré à essayer de comprendre ce qu’elle souhaitait signifier sur sa main et cherchant à s’assurant qu’aucun piège ou adversaire ne soit dans les environs. Il n’arrivait pas à comprendre la signification du tracé mais ne prêtait plus attention à celui-ci. Roan avait focalisé son attention sur le calme semblant des marais jouxtant la forêt. Un calme pouvait avoir tant de signification, qu’il ne voulait interpréter celui-ci trop rapidement. Cependant, certains qu’il n’y avait relativement rien à craindre, il relâchait la Skaikru.
« Tu es seule ? »
Question afin de surtout s’assurer qu’aucun groupe de ce peuple tombé du ciel ne lui tombe désormais dessus. Il n’avait pas été grandement en leur contact jusque-là, mais le peu qu’il avait appris sur eux suffisait à lui confirmer leur instinct de protection entre eux. Sans compter leur utilisation d’arme dont il n’avait pas lui-même la maîtrise. Les armes à feu étaient réservées aux démons s’étant abrité sous le Mont Weather et les natifs n’avait jamais appris à les utiliser.

Ils avaient marchés durant un long moment. Du moins, cela faisait un bon petit moment que la petite se faisait transporter par cet étrange grounders au beau milieu de la forêt. Cette dernière n’avait pas bougée d’un pouce, si on oublie le message qu’elle avait tenté de lui transmettre. Depuis, plus rien. Elle savait que c’était une mauvaise idée de bouger, que ce soit pour sa propre survie que pour celle de la personne qui l’avait aidée.
Il n’avait rien dit à la suite de son message. L’avait-il compris ? Tant pis. Elle pourrait toujours lui dire à haute voix plus tard.
Étrangement, et ce malgré la situation, la jeune fille ne se sentait pas du tout en danger. Elle avait l’impression que rien n’allait lui arriver, tant qu’elle était à côté de cet étranger. Pourquoi ressentait-elle cela, alors qu’elle était une grande peureuse à la base ? Elle-même, elle ne comprenait pas. Sa vie était entre ses mains, étant donné la situation. Si l’envie lui prenait, il pourrait la tuer sans aucuns remords. Mais rien. Elle n’arrivait pas à ressentir de la crainte pour cet homme.
Ils finirent pas s’arrêter, restant immobile durant un instant. Puis, après quelques minutes, il finit par la lâcher. Elle se retourna, pouvant ainsi faire face à son interlocuteur. Il était bien plus âgé qu’elle, elle aurait du avoir peur. Mais ce ne fut pas le cas. Elle n’arrivait plus à comprendre ce qui lui prenait. Pourquoi était-elle aussi sereine à ce moment là, alors qu’elle aurait pu mourir quelques instants plus tôt ?
Pour répondre à sa question, elle se contenta de bouger la tête de gauche à droite. Cela faisait un moment qu’elle avait perdue son groupe. Leur retrouvailles n’allaient certainement pas se produire avant un petit moment. Elle baissa ensuite les yeux, un peu intimidée. Mais pas effrayée. Ce qui était une bonne chose, avec elle.
- M-Merci …
Que pouvait-elle faire ou dire d’autres ? Elle n’avait rien à lui donner pour le remercier. Et elle n’était pas sure qu’il accepte quoi que ce soit de sa part.
Elle regarda ensuite autour d’elle, essayant de voir si elle ne reconnaissait pas les lieux. Il fallait qu’elle retrouve le plus rapidement possible son chemin. Sinon, elle ne donnait pas cher de sa peau. Il fallait que personne ne sache qu’elle était toute seule dehors !

Pourquoi Roan s’entichait-il de cette gamine ? Il n’en savait pas vraiment quelque chose et était bien content d’être seul. Il imaginait bien ce que cela pourrait donner s’il rencontrait l’un des siens alors qu’il protégeait une enfant, une peuple du ciel. D’autres n’auraient eu aucun scrupule à s’en débarrasser pour éviter d’attirer tous les dangers sur eux. Pour le Prince, il n’en était rien. Il pouvait le faire, cela ne lui coûtait rien d’autre qu’une poignée de secondes, mais cela pouvait aussi avoir un effet inverse. Les Skaikru semblaient sous la protection de Heda, sans compter les charognards pouvant rôder dans les alentours. Il n’avait pas eu à réfléchir bien longtemps et c’était certainement cette réflexion qui l’avait mené à l’aider.
Mais il continuait de l’éloigner d’un danger qu’elle ne connaissait pas, alors qu’il aurait pu la laisser pour continuer son chemin. Maintenant qu’ils étaient hors de danger, du moins à première vue, il avait laissé plus de liberté à cette jeune semblant perdue. Il avait froncé les sourcils à sa réponse, elle disait ne pas être seule ? Roan avait jeté un coup d’œil aux alentours pour voir si d’autres Skaikru traînait dans le coin. Il n’aimait pas ce peuple et s’il pouvait en supporter une, il plierait bagage au moindre signe d’un troupeau d’entre eux. Ils étaient des opportunistes ayant réussi par il ne sait quel moyen à se mettre Heda dans leurs petits papiers. Lui ne voyait en eux que des envahisseurs réclamant un droit n’étant plus le leur depuis que leurs ancêtres l’avaient quitté. Les natifs se battaient au quotidien pour garder cette terre étant la leur. Eux, tombaient du ciel et se disaient légitimes, alors qu’ils ne l’étaient en rien.
« Où sont les autres ? »
Il entendait son remerciement, mais cela ne lui faisait rien. Il pouvait encore la laisser là, elle n’avait pas à le remercier, ou alors c’était encore une de ces coutumes étranges. S’il la sortait de cette forêt, là le remerciement serait légitime, mais pour l’heure, elle était simplement chanceuse.
La seule présence de d’autres Skaikrus l’occupait désormais. S'il ne craignait guère les bêtes habitants dans les lieux, étant lui-même aussi redoutables qu’elles quand il le souhaite, les êtres humains étaient différents. Ils pouvaient penser de façon stupide et le peuple du ciel pouvait très mal prendre la situation actuelle. Habituellement, cela ne le dérangeait que peu que l’on se trompe sur lui, mais les choses changeaient quand ces personnes maniaient les armes des Maunons.
« Ton groupe est armé ? »
Autant le savoir le plus tôt.

Noha ne parlait pas beaucoup, se disant que c'était le mieux à faire. Après tout, bien que le calme semblait régner, ils étaient toujours à la merci du danger. Elle, en tout cas. Lui, sûrement moins.
Cela ne l'empêchait pas de vouloir éviter le peuple de la brune. Du moins, sa façon de regarder autour de lui après qu'elle lui ait dit qu'elle n'était pas seule la poussa à penser ainsi. Elle répondit à sa question en haussant des épaules.
- Ça fait un moment que j'ai perdue leur trace. Ils sont peut-être rentrés depuis un moment ...
Après tout, Noha faisait toujours partie des skaikru les plus transparents. Ils n'avaient, peut-être, même pas remarqué son absence. Cela l'attristait un peu, bien que c'était la stricte vérité. Il fallait qu'elle se batte encore, si elle voulait que cette situation change.
Ayant baissé la tête, elle la releva en entendant à nouvelle question. Elle garda le silence durant quelques secondes, réfléchissant.
- Si je ne me trompe pas, il y a au moins un garde qui nous accompagne au cas où. Lui seul est armé ...
Ce grounders était le seul à pouvoir l'aider, pour l'instant. Il fallait, effectivement, prévoir au cas où des gens d'Arkadia se rendrait compte qu'elle avait disparu. Si c'était le cas, ils partiraient forcément avec des armes pour se protéger des bêtes sauvages ou des grounders leur voulant du mal.
Elle regarda son visage, l'analysant le plus discrètement possible. Non. Elle n'avait toujours pas peur. Elle avait beau être dans une situation incertaine, elle n'arrivait à craindre ses prochaines actions. Bien sur, il y avait de grande chance qu'il attaque si jamais un membre du peuple de la brune venait à le chercher. Mais sinon, il n'allait sûrement pas leur chercher des poux. Sans savoir pourquoi, Noha en était persuadée.
C'est pourquoi elle suivrait ce qu'il demanderait sans rechigner. Ayant le coeur un peu plus soulagé qu'au départ.

Roan ne pouvait qu’être méfiant face à cette enfant. L’innocence et la jeunesse d’une personne n’étaient jamais une garanti de non-agression. Il suffisait de voir, de nombreux chef de guerre prenait des gosses d’une dizaine d’années comme second. Bien au contraire, s’entraîner jeune permettait une bien meilleure expérience et d’efficacité sur le terrain. Alors même si cette Skaikru semblait trop peu s’y connaître et bien trop frêle pour lui causer du tort, il ne restait pas moins de nombreux facteurs inconnus. La présence de d’autres, une arme cachée, de la ruse. Tout était bon à envisager et pourtant, il s’entichait tout de même de cette personne dont il ne savait rien. Le danger initial n’était plus présent, mais il se méfiait de potentiels autres Skaikru présents. La brune avait dit ne pas être seule et c’est de cela qu’il se méfiait.
Pourtant, les propos tenus allaient permettre au prince d’être un peu moins sur ses gardes. Elle semblait sincère alors qu’il apprenait qu’elle n’était plus avec son groupe. Il ne savait d’eux que ce qu’il avait pu voir et il lui semblait étrange qu’un groupe laisse l’une des leurs alors qu’ils n’étaient pas réellement en territoire conquis. Mais ce peuple intriguait plus que tout l’Azgeda et il ne comprenait pas certains de leur fonctionnement.
« Vous n’êtes pas prudent. Ce n’est pas un seul type qui pourra vous sauver face à d’autres. »
Les gona excellaient dans l’art de se fondre dans la forêt afin d’abattre leurs cibles et même si les Skaikrus étaient sous la protection de Heda, nombreux étaient ceux refusant leur présence. Des natifs aguerris n’auraient eu aucun mal à se débarrasser d’un seul garde, même armé de ces armes habituellement utilisées par les Maunons.
« Qui es-tu ? »
Un peu bourru le Roan, mais s’il devait s’enticher de la fille du ciel, autant savoir qui elle était. Si on lui demandait, il ne saurait pas réellement répondre pourquoi il ne la laissait pas là, se débrouiller seule afin de continuer sa route. Il le pouvait, cela ne lui coûtait rien, mais maintenant qu’il était là, il ne savait pas pourquoi il ne la laissait simplement pas.
La jeune femme restait frêle pour quelqu’un devant survivre dans un monde leur étant inconnu. Cela avait beau faire quelques mois que cet oiseau de fer était tombé du ciel, suivi d’un bien plus gros, Roan considérait que cela restait peu pour s’adapter. Trikru était généreux avec eux en les laissant s’installer là où ils étaient désormais. À Azgeda, ils auraient été exterminés pour leur présence non-désirée et peut-être était-ce ce qui avait pu se produire pour les quelques malheureux ayant fini dans les montagnes. Il ne le savait guère, n’étant pas retourné chez lui depuis fort longtemps. Bien qu’il n’en disait rien, Azgeda lui manquait. C’était peut-être cette part d’humanité en lui qui l’empêchait de délaisser la Skaikru.
« Vous étiez en mission dehors ? »
Maintenant qu’elle était là, il cherchait à mieux saisir le pourquoi de sa présence dans les marais Trikru. De la curiosité, mais aussi de la récupération d’information. D’abord pour lui, mais il pouvait toujours jauger de l’utilité ou non. En attendant, il cherchait à mieux cerner la situation afin d’agir en conséquence.

La jeune fille ne pouvait absolument rien voir des sentiments que pouvait ressentir cet étrange personnage. Sa naïveté et le masque de froideur du guerrier y étaient pour beaucoup. Pourtant, la peur n'avait toujours pas reussit à la prendre par les tripes. Si elle arrivait à lire en lui, elle aurait peut-être même eut le courage de vouloir l'approcher plus. Mais pas pour le moment. Elle ne pouvait savoir s'il allait lui laisser une chance ou, au contraire, la rejeter à la seconde suivante.
Elle haussa les épaules face à sa réponse.
- On a encore beaucoup de choses à apprendre ...
Elle ne disait pas cela juste pour paraître gentille. C'était la pure vérité. Ils avaient beau avoir passé pas mal de temps sur la terre, ils n'en était pas plus fort que ceux qu'ils y vivaient depuis toujours. S'ils espéraient pouvoir vivre longtemps, ils avaient encore du chemin à parcourir. Et Noha faisait partie des rares à vraiment l'accepter. À vraiment vouloir grandir dans ce milieu hostil. Il était temps que les plus forts, ceux qui devaient les protéger, se décident à vouloir faire pareil.
Elle osa le regarder le regarder à nouveau lorsqu'il lui demanda qui elle était. Elle ne put s'empecher de sourire face à son ton bourru, mais reprit rapidement son sérieux. Après tout, ils n'avaient pas la même culture. Elle ne savait pas comment il allait réagir en la voyant sourire. Et elle n'avait pas envie de se le mettre à dos alors qu'il l'avait aidé.
- Je m'appelle Noha.Et vous ?
Elle n'allait pas l'identifier comme le guerrier durant tout le trajet. Ça ne serait pas très polit de sa part. Et puis, au bout d'un moment, ne pas savoir son nom risquait de devenir gênant.
Il passa ensuite rapidement à autre chose, lui demandant ce qu'ils faisaient dehors. Encore une fois, elle lui dit automatiquement la vérité.
- On peut dire ça, oui. C'était pour le ravitaillements. C'était la première fois que je sortait. Alors, comme une idiote, je les ai perdue de vue ...
Elle se gratta la nuque, gênée. Elle n'avait aucune excuse. Elle aurait du être extrêmement vigilante, étant donné que c'était la première fois qu'elle découvrait l'extérieur d'Arkadia. Mais elle ne pouvait pas revenir en arrière. Se lamenter sur son sort ne lui servirait à rien. C'est pourquoi elle passait à autre chose, se disant que le plus important était qu'elle était vivante, aux côtés de cet homme qu'il ne semblait pas aussi méchant qu'il voulait le faire croire.
- Au lieu de rester à ma place, j'ai paniquée et j'ai cherché mon chemin en espérant pouvoir retrouver le camp avant la tombé de la nuit. C'est comme ça que tu'as trouvé ...

L'enfant semblait inoffensive. Si Roan l'avait déjà remarqué, il ne pouvait que le confirmer de par son attitude et ses réponses. Ou alors elle était bonne comédienne, mais il doutait d'un jeu de comédie pour l'appâter. Les craintes de la Skaikru semblaient bien trop naturelles et non une façade qu'elle se donnait. C'était peut-être de faire face à cette innocence de l'humanité qui faisait agir ainsi le guerrier. Ne pas la planter là pour continuer sa route, mais la questionner ainsi. Le prince n'avait pas l'âme charitable, mais sa condition actuelle le faisait agir différemment de ce qu'il aurait pu faire, sachant qu'il se devait d'être dans les bonnes grâces de Heda s'il souhaitait retrouver son titre déchu. Une idée nauséeuse que d'agir ainsi, mais après des années à être ce prince banni, c'était la seule option qu'il lui restait. Tant que sa mère était sur le trône, c'était à lui de dire Amen à tout, ainsi qu’à cette paix instaurée avec ces personnes venues du ciel.

Maintenant qu’ils étaient éloignés d’un premier danger, Roan ne se gênait pas pour relever les erreurs de ce groupe nouvellement installé. Lorsqu’il faisait face à ce qu’il entendait d’eux, l’Azgeda avait l’impression de voir une bande de gosses ne comprenant pas l’ampleur de ce qui les attendaient. Et pourtant, le guerrier avait de l’estime pour les gosses natifs, ceux qui se démenaient pour être l’égal de certains adultes, en ne faisant pas tout et n’importe quoi. La jeune Skaikru relevait un fait véridique. Ils étaient loin de tout savoir de ce monde, malgré le fait que certains se complaisaient à dire qu’ils n’avaient rien à apprendre. Ceux-ci seraient les premiers à mourir, et ce n’était pas une menace du prince, loin de là. Une simple constatation alors que, si les erreurs étaient acceptées par Heda, elles ne l’étaient pas par la nature.

« Roan kom Azgeda. »

Il pouvait en rajouter, préciser son titre de prince, mais face à une Skaikru, il n’en récolterait que plus de questions. Question qui ne faisait que lui rappeler cette condition qu’il maudissait temps, les actes de sa mère qu’il haïssait et ceux de Heda qui ne faisait que jouer avec la volonté du prince de par sa prime pour Wanheda. Roan n’aimait pas cette impression qu’il avait que d’être que le pion d’un jeu de stratégie et il comptait bien interférer là-dedans. Mais tout cela, il le gardait pour lui. À quoi bon partager cette pensée avec Noha alors qu’elle avait elle-même dit qu’ils avaient encore beaucoup à apprendre. Il n’était pas là pour faire un cours sur les différents clans et la géopolitique de la Coalition et il ne comptait pas prendre cette initiative.

La jeune coopérait facilement face à ses questions et c’était un point que Roan ne pouvait qu’apprécier. Il n’aimait pas répéter et elle comprenait vite. Que demander de mieux ? Sans compter qu’elle reconnaissait son absurdité de s’être éloignée. S’était pourtant une règle d’or lors de la découverte d’un territoire : rester grouper et s’assurer mutuellement les arrières, chose qu’il avait lui-même appris très jeune. Mais l’Azgeda n’allait pas non plus enfoncer la faute de la gamine alors qu’elle s’en rendait elle-même compte. Arkadia, il n’en connaissait pas la localisation exact, mais pour avoir traversé de nombreuses fois cette forêt, il en connaissait quelques recoins.

« Estime-toi chanceuse. D’autres guerriers n’auraient pas hésité à transgresser la trêve instaurée par Heda. Vous êtes considérés comme des envahisseurs pour certains clans. »

Dont Azgeda, mais il ne pouvait plus parler au nom de sa mère. D’ailleurs, il ne savait même pas la façon dont elle prenait la présence de ce nouveau peuple qui lui faisait bien trop penser à la menace de la montagne, aujourd’hui éteinte. S’il ne s’était jamais réellement confronté aux maunons, il avait appris à les craindre de par leur usage d’arme à feu. Or, Skaikru avait aussi des armes à feu et l’une des leur avait su exterminer cette menace planant depuis toujours sur la Coalition. De quoi les considérer comme de véritables ennemi, si Heda n’en avait pas décidé autrement.